Le CESC de Corse  
 
    Discours du Président José Rossi
à l'ouverture des travaux de l'Assemblée de Corse
Vendredi 8 décembre 2000
   
   
Le texte du projet de loi qui est soumis par le gouvernement à l'avis des élus de l'Assemblée de Corse aujourd'hui, est sans doute appelé à prendre une importance fondamentale dans l'histoire de notre collectivité.
Importance par la manière dont il a été élaboré : pour la première fois, les représentants de la Corse ont été associés, dès l'origine, à la réflexion et aux engagements d'un gouvernement de la République, sur une réforme d'envergure portant modification du statut de la Corse. Et c'est dans un vrai climat de dialogue, d'ouverture, de transparence et de responsabilité partagée que ce travail intense a pu être réalisé. Il paraît difficile d'imaginer aujourd'hui que cet état d'esprit, qui prévaut depuis maintenant une année, ne sera pas la base sur laquelle la relation si singulière entre la Corse et la communauté nationale pourra, à l'avenir, s'affirmer dans le respect mutuel et la dignité.
Importance par l'occasion historique donnée à la Corse de prendre un nouveau départ dans la paix et la sérénité retrouvées. Cette paix, il nous appartient, aujourd'hui, tous ensemble, de la construire, même si les conditions de son enracinement durable paraissent par moment difficiles. Nous devrons nous saisir de nouvelles compétences, des moyens et des responsabilités prévus par le nouveau statut pour les mettre au service d'une Corse plus solidaire et plus prospère.
Importance enfin par la reconnaissance de notre spécificité insulaire et du caractère particulier des réponses qu'il convient d'apporter aux problèmes récurrents que notre île connaît depuis de trop longues années.
De nombreuses voix s'élèvent un peu partout aujourd'hui en France pour réclamer plus de décentralisation, d'autonomie et de responsabilité pour les collectivités locales, et quelques fois plus fortement que la nôtre. La Corse ne peut que s'inscrire positivement dans cette nouvelle voie de la démocratie moderne indispensable à régénérer un système français sclérosé et toujours frileux face à l'esprit de réforme. Mais il n'en demeure pas moins que la Corse n'est pas, à travers cet avant projet de loi, le laboratoire de la décentralisation française. Sa spécificité insulaire, sa forte identité et la nature politique du problème posé, appellent une réponse institutionnelle " sur mesure ", adaptée à nos particularités. C'est sans doute un des apports fondamentaux du texte que nous examinons aujourd'hui que de reconnaître à la Corse cette place unique et à part entière dans la République Française qui conduira, d'ici à 2004, si la réussite est au bout du chemin, à la reconnaissance de l'originalité corse dans la Constitution.
Ce texte qui est soumis à l'Assemblée de Corse a déjà été jugé par la plupart d'entre vous comme globalement positif.
Nous avons déjà approuvé les grandes orientations de la réforme le 28 juillet dernier parce que nous estimions qu'elles allaient dans le sens des intérêts généraux de la Corse et de la République.
Il nous appartient aujourd'hui de donner un avis sur le contenu juridique du texte qui nous est proposé. Un avis lisible et compréhensible afin que le gouvernement et le Parlement tiennent le plus grand compte de nos choix politiques.
Si un seul mot devait définir le sens de notre démarche commune, c'est celui de responsabilité. Une responsabilité que nous désirons exercer pleinement dans tous les domaines de compétences qui nous seront transférés, au plus près du terrain et de ses réalités.
La loi devra donc définir clairement le contenu des blocs de compétences dont nous souhaitons le transfert en terme de pouvoir de décision, de moyens et de possibilité d'adaptation des normes nationales.
Il n'est plus aujourd'hui possible de faire le choix des demi mesures qui n'accorderaient pas à notre collectivité les moyens effectifs d'une bonne gouvernance. Dans sa relation avec la Corse, l'Etat ne peut pas aujourd'hui donner et retenir. La responsabilité ne peut pas se partager. La Corse a trop souffert de tous les désordres, y compris celui résultant d'une organisation administrative et territoriale complexe et ingérable.
Si un deuxième mot devait compléter le sens du premier, c'est celui de simplification. Simplification des structures et des circuits de décisions. Simplification des textes et allégement des procédures qui brident l'initiative et limitent la capacité à décider.

Nous devons en effet pouvoir décider simplement en Corse des grandes orientations qui conditionnent notre avenir en améliorant la vie quotidienne de tous ses habitants. C'est dans ce cadre qu'il m'apparaît fondamental que la Collectivité Territoriale exerce son rôle de chef de file pour l'exercice de toutes les compétences transférées.
Enfin, un troisième mot devrait nous aider à mieux cadrer notre action, c'est celui de solidarité qui est à la fois un état d'esprit indispensable à l'organisation de notre société et un impératif avec lequel la Corse devra bâtir son développement.
Solidarité entre personnes, entre générations, entre régions et micro-régions, entre littoral et montagne, villes et village, citoyens et administrations, entreprises et institutions. Une solidarité active qui nous fera enfin prendre conscience qu'en Corse l'intérêt général n'est pas uniquement la somme des intérêts particuliers et qu'il est de notre responsabilité à tous, à chaque élu, à chaque citoyen de réussir le pari sur l'avenir que nous engageons aujourd'hui.
Responsabilité, simplification, solidarité, c'est à travers ces trois engagements forts que je vous invite donc à lire le texte qui nous est soumis aujourd'hui et que nous approuverons, enrichi j'en suis sûr, de nos observations et propositions.