VU le Code Général des
Collectivités Territoriales, notamment ses articles L. 4421-1 à L.
4426-1 ;
VU le décret n° 92-1268 du 7
décembre 1992 relatif à la composition et au fonctionnement du
Conseil Économique, Social et Culturel de Corse, modifié par le
décret n° 98-1094 du 4 décembre 1998 ;
VU la lettre des 29 juin 2001
par laquelle le Président du Conseil Exécutif de Corse demande
l'avis du Conseil Economique, Social et Culturel de Corse sur le
plan énergétique de la Corse ;
Sur rapport de M. Maxime
NORDEE ;
APRES EN AVOIR
DÉLIBÉRÉ,
PRONONCE L'AVIS SUIVANT
Après avoir entendu le
rapport de sa Commission du Développement Économique, aux travaux
de laquelle participait un technicien de l'ADEC, le CESC s'est
d'abord interrogé sur le positionnement du plan énergétique :
doit-il se situer en accompagnement ou en promoteur du
développement ?
Le Conseil constate que le
projet s'inscrit dans une démarche d'accompagnement du
développement. Il aurait préféré qu'il affiche de façon plus
dynamique l'ambition de jouer le rôle d'acteur, de promoteur du
développement.
Le CESC relève plus
particulièrement que les projections de consommation n'intègrent
nullement des perspectives de développement autres que de
consommation domestique ; on ne trouve pas non plus, dans le
document, de traduction des retombées en termes de besoins
énergétiques du PEI, par exemple.
De plus, le CESC demande que
le plan énergétique fasse référence aux documents de
planification (PDC et Schéma d'aménagement), s'inscrive en
cohérence avec ceux-ci et vise à la maîtrise de l'énergie dans
la clarté des coûts économiques et sociaux.
Le Conseil s'est ensuite
interrogé sur la pertinence de séparer totalement la programmation
jusqu'en 2012 de la réflexion à plus long terme.
Certes, le dossier est rendu
complexe par la multiplicité des acteurs et des décideurs (CTC-EDF-DRIRE...)
cependant, si la maîtrise du développement énergétique devrait
relever à l'avenir de la compétence de la CTC, il apparaît
nécessaire que cette dernière s'engage sur des choix qui ne
puissent être remis en cause à mi-parcours par la volonté de
partenaires dont les objectifs ne visent pas nécessairement à
répondre en priorité aux besoins insulaires.
Sur ce plan, le Conseil ne
cache pas ses craintes :
* quant à l'incidence de
stratégies d'entreprises comme celle d'EDF qui semble se
désengager dans les îles et les DOM mais s'investir dans
l'international (Cf. schéma de services collectifs) ;
* quant à la pérennité de la péréquation tarifaire nationale ;
* quant à l'inadaptation aux réalités insulaires des
réglementations européennes d'ouverture des marchés (et la Corse
est bien spécifique sur ce plan avec un type de consommation
inversé par rapport à celui du continent et avec sa faible
démographie, face au niveau important des investissements
nécessaires à la production énergétique...)
Eu égard aux considérations
qui précèdent, le CESC approuve globalement les 2 premières
options proposées :
1- " l'exploitation des
centrales thermiques existantes jusqu'en 2012, en accordant une
attention particulière aux questions de pollution atmosphérique,
2- la promotion des énergies renouvelables " (hydraulique,
solaire, éolien...) .
Par contre, s'il reconnaît la
nécessité de garantir la sécurité d'approvisionnement, ainsi que
la priorité à accorder à la diminution des émissions de
polluants atmosphériques des centrales existantes, le CESC se
prononce contre l'interconnexion en courant alternatif avec la
Sardaigne sans projet au delà de 2010 préalablement défini.
Malgré l'impossibilité de
disposer d'une évaluation comparative des coûts entre
l'installation de transformateurs sur la Carbo-Sarde et
l'investissement du câble Corse/Sardaigne, il apparaît que
l'interconnexion au réseau européen existe déjà par la
Carbo-Sarde et que, en conséquence, la réalisation de la liaison
Corse/Sardaigne, sans projet défini au delà de 2010, risque de
déboucher rapidement sur la même problématique qui fut celle du
câble ICO.
En effet, ce projet, s'il
était réalisé, pourrait à terme rendre la Corse
énergétiquement dépendante d'une logique différente des attentes
de la Région, et transférer les emplois vers le nouveau lieu de
production. La disparition de ce secteur de l'industrie placerait la
Corse au rang des pays sous-développés car chaque fois qu'un pays
perd du savoir-faire, il s'appauvrit.
Au-delà de cet aspect
politique, le prétexte utilisé par la Direction d'EDF-GDF, qui
tente de justifier cette interconnexion par la seule amélioration
technique, est un leurre.
En réalité, EDF a programmé
dans sa stratégie économique de se séparer de tous les moyens de
production des îles (Corse et DOM) réputés moins rentables. Cette
politique conduirait en Corse à la suppression de plus de 300
emplois à EDF et certainement plus du double dans le secteur
privé. Le CESC considère que la Collectivité Territoriale ne peut
s'associer à une telle stratégie et demande à l'Assemblée de
Corse de la rejeter.
Il estime enfin que la
coopération avec les autres îles de la Méditerranée doit
s'organiser et s'envisager par l'échange d'une ressource primaire :
la réalisation d'urgence d'un gazoduc Sardaigne/Corse qui offrirait
deux opportunités :
* l'extension du réseau gaz
au-delà des centres urbains que sont Ajaccio et Bastia (ce qui
générerait des perspectives de travail sur de nombreuses années
pour l'ensemble des corps de métiers en relation avec cette
activité),
* l'utilisation du gaz comme combustible pour la production
d'énergie (d'où une pollution quasiment réduite à zéro),
et conduirait ainsi à la
préservation des emplois productifs sur l'île.
En conclusion, le
Conseil Économique, Social et Culturel de Corse émet un avis très
réservé sur l'ensemble du document qui lui est soumis et réclame,
comme il le fait depuis de nombreuses années, l'organisation d'un
grand débat public sur l'énergie, dans lequel interviendraient
toutes les composantes de la société
civile et qui déboucherait sur un plan énergétique conforme aux
aspirations de la population de notre île.
MM. Bianchi, Joubert,
Lalanne, Leca, Mme Sansonetti, M. Santoni ont voté contre le
présent avis. Mme Battesti, MM. Casalonga, Cristiani se sont
abstenus. |