Des principes à affirmer
ou à réaffirmer et un bilan à dresser
Le Plan de Développement de la Corse
adopté en 1993 se proposait de donner aux insulaires " le sentiment et la
réalité dune appropriation " et de " préparer la jeunesse à
sépanouir et à maîtriser son devenir ".
Six ans après, les chiffres significatifs
de la situation économique et sociale de la Corse sont qualifiés par le Président du
Conseil Exécutif de " sévèrement pessimistes ".
Dans ces conditions, au tiers de la durée
dapplication du P. D. C., peut-on " réaffirmer des principes "
sans analyse approfondie de limpact des mesures engagées ?
Saisi une première fois en novembre 1998
du document sur lequel il est à nouveau appelé à se prononcer en raison de
lannulation des élections territoriales, le CESC avait affirmé la nécessité
dune véritable évaluation, en termes de retombées économiques et sociales et non
seulement quantitative telle quelle apparaît chaque année dans le rapport spécial
dont fait état le Président du Conseil Exécutif et qui se borne à " rendre
compte " à lAssemblée de la situation de la CTC sans, à aucun moment,
évaluer les politiques
La conduite du développement est, en
effet, un processus continu dont les risques denlisement et de déviation ne sont
atténués que par lévaluation permanente des modalités de programmation et de
réalisation des opérations ainsi que des résultats de leur mise en uvre.
Alors que de nombreux dispositifs comme le
statut fiscal ou la zone franche sont réputés concourir au développement de l'île,
aucune analyse de leurs retombées ne vient confirmer leur efficience supposée.
Il est donc indispensable et urgent
de renforcer la mission de la cellule " évaluation " de la
Collectivité en la chargeant de convaincre les élus et tous ses partenaires quil
est vain de continuer à afficher des objectifs si lon ne dispose pas des éléments
permettant dapprécier les effets réels des politiques déjà mises en uvre
pour les atteindre.
La réforme des fonds structurels
La situation faite à la Corse et à la
Région Hainaut / Valenciennes (exclusion des régions classées en objectif N° 1) est
une conséquence de l'élargissement de l'Union Européenne et donc d'un nouveau calcul
des PIB/h qui a conclu à une remontée (relative) de leur PIB/h au-dessus du seuil
des 75%.
Ces nouvelles dispositions, fortement
pénalisantes pour le financement des infrastructures publiques, en particulier celles des
collectivités locales (eau, assainissement, déchets
), posent en outre la question
du taux maximum des aides des fonds structurels qui risque de passer de 75% à 30% du
coût total éligible, posant ainsi le problème du cofinancement des opérations.
Des objectifs et des orientations à
définir.
En faisant de la création
demplois " une préoccupation majeure ", le Conseil
Exécutif corrige une omission de taille par rapport à sa note précédente.
Comme en 1998, le CESC soutient que la
seule vraie perspective du développement doit être la prospérité de tous et que,
pour y parvenir, la seule vraie priorité est effectivement lemploi durable.
Au regard de la situation critique de
la Corse dans ce domaine, les conflits dattributions sont dérisoires. Certes, la
Collectivité nest pas directement compétente mais elle est éminemment concernée
et doit accompagner, voire inciter et accélérer, les actions de lEtat et
simpliquer dans la mise en uvre de mesures spécifiques de soutien :
- au développement de nouveaux services
à la personne (services de la vie quotidienne, amélioration du cadre de vie,
culture, tourisme, loisirs) qui représentent de véritables gisements demplois
potentiels,
- aux actions en faveur des publics de
plus en plus en difficulté en raison de laccroissement du chômage de longue
durée,
- à la pluriactivité qui permet de
donner une définition plus large au travail en reconnaissant à certaines tâches une
utilité sociale,
- à la jeunesse en laidant à
accéder à un premier emploi,
- à la revalorisation de certains
métiers, notamment dans le secteur agricole où lexploitation traditionnelle
de loliveraie et de la châtaigneraie, entre autres, recèle un très fort potentiel
économique local.
Les équipements collectifs liés à
leau, lassainissement et lélimination des déchets.
En ce qui concerne la gestion de
leau, le CESC souhaite, dune part, quune réflexion plus vaste soit
menée compte tenu des enjeux à venir et, dautre part, que, lors de la construction
des barrages, une attention toute particulière soit portée au respect de
lenvironnement immédiat et que les surcoûts engendrés soient inclus dans les
prévisions financières. Par ailleurs, la révision des objectifs en matière deau
brute peut conduire à un ralentissement des investissements du fait de la sortie
programmée sur 5 ans de lobjectif N° 1.
Sur les déchets, bien que la prise
en compte de la nécessité de modifier leur actuelle gestion en Corse soit tardive, la
volonté du Conseil Exécutif de se positionner en tant que maître duvre
coordonnateur est de nature à favoriser une dynamique densemble aboutissant à de
solutions concertées. Le Conseil Economique, Social et Culturel suggère que, parmi
celles-ci, les actions de tri-valorisation soit prioritairement soutenues.
En outre, sagissant des campagnes
dinformation et de sensibilisation, indispensables à la réussite de la politique
de traitement des déchets, elles doivent être complétées par des actions éducatives
menées en étroite collaboration avec tous les partenaires concernés :
collectivités, entreprises, associations, ménages
Par ailleurs, le CESC souhaite quà
linitiative de la CTC une concertation avec lEtat sengage rapidement
pour aboutir à la mise en place de casernes de pompiers (Ajaccio, Sartenais, Balagne,
Cortenais)
Le réseau routier
Le CESC a déjà eu loccasion de
souligner que la modernisation du réseau routier constitue un préalable au
développement, notamment du tourisme dans lintérieur de lîle, et que
lamélioration des relations routières entre les villes du littoral et les villages
contribue à maintenir dans ces derniers les habitants qui travaillent en zone urbaine et
participe, donc, à la survie de lespace rural.
Le retard de mise à niveau naffecte
pas seulement les ex R. N. La disparité entre le réseau de celles-ci et celui des routes
départementales (R. D.) est dautant plus criante que le réseau départemental est
plus étendu et sans commune mesure avec les moyens qui lui sont affectés.
Il faudrait examiner la problématique
dun " réseau routier dintérêt régional ", dans une
logique daménagement du territoire et lié au développement du réseau ferré. La
maîtrise douvrage de ce réseau régional (ex R. N. + certaines R. D.) serait
assurée par la seule C. T. C.
Cette nouvelle politique routière
impliquerait le doublement des moyens financiers actuellement mis en uvre pour la
mise à niveau du réseau routier corse.
Des orientations en 10 " points
forts "
1) Aménagement du territoire
En lespèce, ladoption du
schéma daménagement, qui incombe à la Collectivité Territoriale est et demeure
une priorité. Ce nest quà partir de ce document durbanisme que
pourront être définies clairement les politiques à mener pour
" reconquérir " lintérieur et développer harmonieusement le
littoral.
Le CESC tient, toutefois à rappeler,
quil continue à considérer que laménagement du territoire nest pas
une simple fonction spatiale mais un véritable principe organisateur
du développement.
Habitat et logement
Bien que lEtat dispose de
lessentiel des compétences dans ces domaines, la Collectivité Territoriale ne
saurait ignorer la situation en Corse : un manque crucial de logements. Face à ce
constat, deux axes sont à privilégier.
Un accompagnement du volet logement
social par la CTC. Partie prenante dans la recapitalisation des offices publics
dHLM, la Collectivité Territoriale doit veiller au logement social des plus
défavorisés. A ce titre, elle doit soutenir les nouvelles opérations de construction.
Un appui aux stratégies de
développement de loffre de logements dans le secteur privé qui nest
jamais retenue comme un vecteur possible damélioration de la situation du logement
en Corse alors quil apparaît, au contraire, que la CTC doit accompagner toute
initiative de lEtat, des autres collectivités et des associations en faveur de ce
secteur car il est actuellement lun des rares susceptibles doffrir des
logements. A titre indicatif des interventions sont possibles :
- au niveau de laide à la réhabilitation des
logements insalubres ou anciens.
- en matière daide à la prospection des
propriétaires.
- en faveur du logement des jeunes qui nécessite un
effort particulier.
En outre, une analyse attentive du
problème des financements complémentaires simpose. Les communes, qui sont pour la
plupart dans lincapacité dassumer leur participation financière, sont
particulièrement concernées et lintercommunalité pourrait constituer un
début de solution.
2) Développement économique
Comme la maintes fois souligné le
CESC, notamment dans ses prises de position en faveur dune économie identitaire, la
Corse est aujourdhui confrontée à une économie européenne et mondiale dans
laquelle elle doit essayer de trouver sa place sous peine dêtre laminée. La
Collectivité Territoriale doit devenir un véritable partenaire des entreprises et le
soutien politique au développement économique doit tendre en premier lieu à
lamélioration de celles-ci collectivement et individuellement, notamment en :
- substituant une véritable banque de développement au
dispositif actuel des subventions ;
- améliorant les partenariats ;
- développant des actions nouvelles en matière daide
au conseil et de formation en faveur des entreprises de moins de 50 salariés ;
- orientant, par des mesures dincitation particulières,
les crédits générés par les produits dépargne et dassurance - qui ont
dexcellents résultats en Corse mais contribuent fort peu au développement
économique - vers laide à la création dentreprises et demplois ;
- revitalisant le tissu économique (desserte commerciale de
base pour lensemble de la population, notamment en milieu rural, modernisation de
lappareil commercial, amélioration de lenvironnement des entreprises) ;
- suscitant et favorisant les démarches individuelles et
collectives dentreprises visant à lamélioration de la qualité ;
- prospectant à lextérieur les entreprises
susceptibles de sinstaller en Corse.
- réactivant le C. C. D. I. C.
3) Tourisme
Comme le propose le Conseil Exécutif, il
convient de structurer enfin ce secteur, mais ce ne peut être quen synergie avec
les autres domaines ; car, si le tourisme doit être " le levier majeur
du développement ", il nest pas souhaitable les exemples de
mono activité le démontrent assez quil en soit LE SEUL. Il ne
saurait être question, en effet, dexclure le nécessaire soutien au développement
des autres activités productrices, à lémergence de nouveaux domaines
dactivité, à la restructuration de lagriculture, mais il convient de
hiérarchiser les objectifs.
Sous cette réserve, le développement
touristique est indéniablement le meilleur moyen de lutter contre le premier handicap de
la Corse, létroitesse du marché intérieur, et de créer rapidement des emplois
durables et qualifiés. A cet effet, la création dune école hôtelière
simpose.
Laugmentation de la fréquentation
touristique, dont la nécessité ne saurait être mise en cause mérite cependant la plus
grande vigilance, tant par rapport à la protection de lenvironnement naturel
quà son impact sur la population sédentaire.
Cest pourquoi le tourisme de
lintérieur devra senvisager en extension du littoral et au prix dune
valorisation des sites et des villages, obtenue par lamélioration du bâti ancien
et des lieux publics traditionnels, en limitant limplantation dunités
dhébergement à des projets de dimension moyenne très intégrés au territoire et
en favorisant la création dhébergement diffus en zone rurale.
Le " manque dunités
hôtelières de standing " peut, pour partie, être pallié par la recherche de
la qualité de lexistant qui concerne tous les pans de lindustrie touristique.
Enfin, il faudrait que les professionnels
du tourisme prennent réellement la mesure des apports dun véritable tourisme
culturel. Pourtant, lun des objectifs de la politique de développement culturel
définie par le Plan de Développement de la Corse était de " générer une
intégration plus forte entre les activités économiques et les activités culturelles,
ce qui suppose dappréhender la culture comme une filière économique
"
Il appartient à lA. T. C. dimpulser une réflexion en ce sens. |